Yoro Sidibé dit Saran Yoro du nom de sa mère n’est pas un inconnu du monde des chasseurs. L’homme est très influent. Nous avons eu la chance de le suivre au cours d’un spectacle tout récemment à Sebenicoro. Par sa voix, sa maîtrise d’instrument (le ndonso-n’goni), et les textes, Saran Yoro n’est pas en terrain inconnu. Plusieurs ndonso-n’gonifola étaient de la fête car il s’agissait d’une manifestation des chasseurs.
A la prestation de Yoro Sidibé ce fut la ruée sur l’espace de la manifestation. Boutiquiers, revendeurs de cartes et autres usagers qui étaient de passage, se sont dirigés vers le petit terrain de football, pour suivre l’enfant de Bambala, arrondissement de Sikorolen, cercle de Yanfolila (Wassoulou) région de Sikasso. Sa voix donne du tonus aux chasseurs. Le maître du ndonso-n’goni qui était dans ses beaux jours a gratifié le public de certains de ses morceaux comme ‘’Dankoroba Nianza », dédié aux grands maîtres de la brousse, ‘’Noumou », ou encore ‘’N’Tana ». Chacun de ces morceaux fait à peu près trente minutes. Il faut être un grand et poser des actes de bravoure pour danser au son de la musique de Yoro Sidibé.
Après plus d’une heure et demi de prestation, Saran Yoro répond à nos questions sur le Donsoya. Il a commencé par demander pardon aux initiés et aux mîtres de la brousse. Pour lui le Donsoya est le métier de chasseur «C’est héréditaire chez nous parce que je suis l’homonyme de mon grand-père, lui-même fils de Samba Sidibé qui avait défié Samory Touré en lui interdisant tout accès à son village Bambala» dira-t-il. C’est justement dans cette famille brave où tous les hommes deviennent systématiquement donso que Yoro Sidibé a vu le jour dans les années 40.
Au-delà de son cercle familial Yoro Sidibé n’a pas d’autre maître même s’il se confie à ses aînés comme le veut la tradition et non pas pour la soif de la connaissance ou du secret du métier. «Le n’gonifola est à la fois le confident du Donso et l’animateur des moments de détente des Donso à leur retour de chasse, qui à l’occasion relate à l’assistance la bravoure, les difficultés surmontées et les épreuves vécues» laisse-t-il entendre.
A Bambala, on était obligé d’aller chercher un n’gonifola dans les villages environnants pour l’animation des moments de détente. C’est pour palier à ce manque que notre artiste Yoro Sidibé prit la résolution de confectionner un donso n’goni. Après plus de 40 ans de métier, ce singulier donso n’gonifola à la voix envoûtante a déjà publié une vingtaine d’albums. Yoro Sidibé a formé plus d’une trentaine de donso n’gonifolila. Il puise son inspiration dans ses parties de chasse et à travers les comportements des animaux. «La différence entre les autres donso n’gonifola et moi se situe à ce niveau. Pour être un bon chanteur, il faut d’abord être un vrai Donso afin de connaître les secrets du métier» se confie t-il. Avant d’ajouter que «Le donsoya est une tradition africaine, le pouvoir de tous les chefs en Afrique reposait sur le Donso et était pour la plupart eux même Donso… ». «Au Mali tous les villages ont été créés par les Donso… » Poursuit-il. Yoro Sidibé joue le donso n’goni à la perfection et sa renommé a largement dépassé les frontières nationales. Aujourd’hui il a plus de soixante albums, des tournées, au Mali, Guinée, Côté d’Ivoire, Burkina Faso.
Kassim TRAORE