L’instant était solennel hier au Centre d’instruction Boubacar Sada Sy de Koulikoro. Debout sur la place d’armes, 54 jeunes officiers faisaient face au drapeau et au président de la République, le chef suprême des armées. Après avoir reçu leurs épaulettes de sous-lieutenant, ils ont juré de servir la patrie avec honneur, loyauté et dévouement. Ils ont aussi fait le serment de respecter et de faire respecter la Constitution et les institutions du pays. Le Centre d’instruction militaire de Koulikoro, a donc vécu hier des moments d’émotions à l’occasion de la cérémonie de baptême de la 31è promotion de l’Ecole militaire interarmes (EMIA).
Cette cérémonie militaire était placée sous la présidence du président de la république, Amadou Toumani Touré et a réuni plusieurs autres personnalités : le Premier ministre, Modibo Sidibé, le président de l’Assemblée nationale Dioncounda Traoré présent à double titre (il est le fils du parrain de la promotion), les membres du gouvernement dont le ministre de la Défense et des anciens combattants, Natié Pléa, le chef d’état-major général des armées, le général de brigade Gabriel Poudiougou, les chefs d’état-major et directeurs de service des forces armées et de sécurité. Les diplomates accrédités dans notre pays avaient fait le déplacement à Koulikoro, ainsi que des membres des familles et des amis des nouveaux promus.
Le chef d’état-major général des armées, le général Gabriel Poudiougou a traduit dans les faits, une volonté du chef suprême des armées, en baptisant cette nouvelle vague d’officiers au nom du lieutenant-colonel Boubacar Traoré.
Plusieurs théâtres d’ opérations :
Officier émérite, le lieutenant-colonel Boubacar Traoré était né le 15 juillet 1913 dans une caserne à Mao au Tchad où son père Baba Traoré servait dans les rangs des forces armées coloniales françaises. Il fût admis à l’Ecole des enfants de troupe de Kati en 1925. Il s’engagea tout naturellement dans l’armée française en 1932. Commença, alors pour Boubacar Traoré, une longue et enrichissante carrière militaire. Laquelle débuta au 5e Régiment des tirailleurs sénégalais au Maroc où il étrenna son galon de caporal une année plus tard, puis de sergent quatre ans plus tard.
Sorti major de sa promotion au cours des transmissions, Boubacar Traoré est nommé au titre d’aspirant et décroche ses épaulettes de sous-lieutenant le 25 septembre 1948 en Indochine. Sa nouvelle carrière d’officier le mènera sur plusieurs théâtres d’opérations. Promu au grade de lieutenant, puis de capitaine en 1956, au cours d’un second séjour en Indochine, Boubacar Traoré revient au bercail et est affecté au bataillon sahélien de l’ouest (BSO), d’où il est encore mobilisé pour l’Algérie en avril 1959. Admis sur sa demande à faire prévaloir ses droits à la retraite le 1er janvier 1960, le capitaine Traoré est ensuite rappelé au service actif après l’accession de notre pays à la souveraineté nationale et internationale.
On lui confia alors la mission fondamentale d’organiser le corps nouvellement créé de la Garde républicaine et du Goum du Mali. Il est nommé à cet effet au grade de commandant (1961) et de lieutenant-colonel trois ans plus tard. Feu Boubacar Traoré est détenteur de plusieurs distinctions honorifiques : chevalier de la Légion d’honneur de France, l’officier de l’Ordre national du Sénégal, la croix de la Valeur militaire, la Médaille coloniale des blessés, l’ordre de l’Etoile noire de France. Il obtint une profusion de médailles commémoratives de campagnes. Il nous a quitté le 3 septembre 1974.
C’est des hauts faits de cet officier supérieur d’exception que le chef d’Etat-major général des armées, le général Gabriel Poudiougou a exhorté les jeunes officiers à s’inspirer tout au long de leur carrière. « Votre carrière durant, vous porterez les lourdes charges de cet héritage exigeant. Votre parrain a, tout au long de son parcours, fait montre de courage, de dévouement, de patriotisme et a toujours respecté l’esprit du serment d’officier que vous venez de prononcer devant cette auguste assemblée. Suivez son exemple », a invité le général Poudiougou.
Trois officiers femmes : Il a ensuite rappelé aux jeunes officiers, qu’ils n’ont pas fait le choix de la facilité en optant pour l’armée. « Le statut militaire nous impose des règles de comportement très strictes et un don de soi sans réserve. Face aux bouleversements que connaît notre époque, je vous invite à faire preuve de beaucoup d’imagination et surtout de courage pour relever les défis complexes auxquels nos pays et nos armées se trouvent confrontés. Les différentes menaces auxquelles nos Etats auront à faire face ont désormais un caractère transnational., a analysé le chef d’état-major général des armées.
Aussi les liens d’amitié et de camaraderie que vous avez su tisser entre vous promotionnaires venant de différents pays constitueront un bon terreau pour une collaboration future. Il devient indispensable de concevoir un système de défense dans lequel les forces armées et les forces de sécurité sont appelées à travailler ensemble »
La promotion qui porte le nom du lieutenant-colonel Boubacar Traoré compte 54 officiers dont deux du Burkina Faso, autant du Niger, du Sénégal et du Togo. Il faut noter aussi la présence de trois officiers femmes parmi les 46 Maliens.
Ces 54 nouveaux promus portent à 992, le nombre total d’officiers formés à l’Ecole militaire interarmes qui a pris ces dernières années, une dimension continentale. Parmi les officiers qui sont passés par là, on dénombre 26 Nigériens, 21 Guinéens, 19 Sénégalais, 16 Burkinabés, 3 Ivoiriens, deux Togolais, un Gabonais, un Centrafricain et un Tchadien. S’adressant à la presse à la fin de la cérémonie, le président de la république, Amadou Toumani Touré a indiqué : « Je commencerai par parler du parrain. Il n’est jamais trop tard pour mériter des récompenses de la patrie. Je pense qu’il faut simplement jeter un coup d’œil sur les états de service du colonel Boubacar Traoré pour se convaincre que l’histoire de l’homme est aussi l’histoire d’une époque. Je pense que le défi est grand.
Ils ont pris le nom d’un grand homme qui a apporté d’immenses services à son pays. Il a été un brillant soldat et un bon guerrier. Je voudrai profiter de l’occasion pour remercier le gouvernement et saluer le ministère de la Défense et des anciens combattants, l’état-major général des armées et la direction des écoles militaires, ainsi que les instructeurs et tous ceux qui ont contribué à la formation de ces jeunes officiers ».
Le chef de l’Etat a félicité les membres de la famille de feu Boubacar Traoré, pour cette reconnaissance accordée « à notre papa ». « Cette cérémonie me rappelle une autre en 1972, quand je me suis trouvé dans la même situation que les cadets d’aujourd’hui. Le parrain de notre promotion s’appelait général Abdoulaye Soumaré », a confié Amadou Toumani Touré.
M.N.TRAORE