C’était l’effervescence, hier, à la Bourse du travail, où une marée de travailleurs compressés, en grogne contre l’Etat, s’est exprimée par voix de haut parleur. Ils sont persuadés, ont-ils dit, qu’aujourd’hui, le pouvoir ATT est en train de les narguer, car cela fait 4 ans qu’on les fait tourner en rond comme des mendiants.
Néanmoins, ils ne feront pas comme les rebelles touarègues, ils ne prendront pas les armes, ont-ils assuré, mais ils prendront la rue, avec femmes et enfants munis d’ustensiles de cuisine, pour dire à ATT et à Modibo Sidibé que trop, c’est trop !
Les travailleurs compressés ont donc décidé d’organiser une marche, mardi 5 août prochain, de la Bourse du travail à la Primature. Certains d’entre eux avaient même suggéré une marche jusqu’à la présidence pour signifier toute leur détermination. Leur problème, ont-ils clamé, a trop duré et puisque nous sommes en démocratie, ils vont user de tous les moyens légaux à leur disposition pour obtenir satisfaction.
Ils ont demandé aux femmes compressées de s’impliquer activement en sortant le 5 août munies d’ustensiles de cuisine et de mobiliser leurs enfants. De ce fait, ont-ils martelé, ils comptent sur une marche très imposante, d’environ 5000 personnes, susceptible de traduire toute leur volonté de faire reculer le pouvoir et d’obtenir la satisfaction de leurs doléances.
C’était au cours d’une assemblée générale de l’Association des travailleurs compressés du Mali (ATCM), tenue hier, dans la cour de la Bourse du travail. Le président de l’ATCM, Ousmane Berthé s’est exprimé ainsi : «Le ministre des Finances, lors de notre dernière rencontre, avait promis d’examiner les propositions de l’ATCM et celles du contentieux du gouvernement. Cela n’a pas été fait.
Le ministre Abou-Bakar Traoré a directement envoyé les propositions du contentieux au ministre de la Fonction publique en soutenant que ce sont les propositions de l’Etat. Pour nous, ces propositions sont inacceptables, c’est pourquoi nous avons organisé cette assemblée générale pour appeler tout le monde à une marche le 5 août en direction de la Primature».
Au cours de l’assemblée générale, Cheikh Oumar Sissoko, secrétaire général de l’ATCM a signalé à leurs militants que leurs jugements continuent d’être annulés. Interrogé sur ce point, Ousmane Berthé s’est référé au discours tenu par ATT, s’adressant au président de la Cour suprême, le 1er janvier, qui disait que «les condamnations pécuniaires de l’Etat sont de trop».
L’ATCM en avait déduit que le président de la République parlait d’eux. Depuis cette déclaration d’ATT, a souligné le président de l’ATCM, que ce soit au niveau du tribunal du travail ou à la Cour d’appel, les dossiers des compressés sont systématiquement annulés.
Pour le restant des dossiers, ils ont décidé d’aller aux transactions, d’accord parties. La pomme de discorde se trouve au niveau des montants. Après plusieurs négociations, l’ATCM a revu la somme de 58 milliards initialement réclamés à la baisse jusqu’à hauteur de 25 milliards mais le contentieux propose 2 940 450 536.
Les compressés ont assimilé cette proposition à de la provocation. Ils appellent leurs militants, avec toutes leurs familles, à une grande manifestation jusqu’à la Primature, mardi 5 août. Certains ont proposé d’aller jusqu’à Koulouba.
Samballa Kanté, compressé de la Régie des chemins de fer du Mali, qui réclame l’exécution de sa grosse de justice, est intervenu pour demander à la foule si nous nous trouvons dans un Etat de droit.
Il ne comprend toujours pas que le tribunal, depuis 2007, lui donne raison avec 46 de ses anciens collègues et que l’exécution de cette décision soit bloquée, malgré la promesse du chef de l’Etat, Amadou Toumani Touré qui n’a pas tenu parole. Il n’est pas seul à se soulever contre le pouvoir en place. M. Haïdara demande d’implorer Dieu pour qu’il «incline le cœur de nos gouvernants vers un accord avec les compressés ou qu’il les anéantisse d’un seul coup».
Ce qui montre l’atmosphère de grogne dans laquelle baignait hier la Bourse du travail. Un autre militant de l’ATCM a pris la parole pour dire d’exclure Dieu ou d’autres divinités de cette affaire, car, a-t-il dit, il a passé 6 ans à La Mecque et sait que leur problème ne sera résolu que par une action vigoureuse d’hommes qui ont les pieds sur terre.
Il ne faut pas, dit-il, se faire trop d’illusions en invoquant Dieu pour des problèmes que nous nous créons. Car, cette affaire a trop duré et trop c’est trop ! Ils ont néanmoins accepté la proposition d’un militant qui a demandé de réciter la Fatiha avant de clore l’assemblée générale car, a-t-il précisé, en toutes choses, il leur faut les bénédictions de Dieu pour qu’elles aboutissent.
Baba Dembélé