Natif de Ouélessébougou dans le « Djitoumou », Idrissa Soumaoro est aujourd’hui l’Inspecteur général de musique. c’est lui qui s’occupe depuis 1996 du suivi pédagogique dans les lycées sur tout le territoire National. Diplômé de musicographie Braille, le roi de la musique Malienne a fait 18 ans d’enseignement à l’Institut national des aveugles.
« Le nombre d’albums produit ne fait pas l’artiste, mais la durée d’écoute de l’album dans le temps » , c’est ce que nous laissé entendre l’auteur de « Ancien combattant » lorsque nous sommes allés à sa rencontre chez lui à Badalabougou sema II où il était seul dans une salle, entouré par les différents instruments musicaux qu’il joue. Agé de 60 ans, le maestro Idrissa Soumaoro à un seul album à son actif intitulé « kôtè » sorti le 22 mai 2003, un album qui après une production nationale a été reproduit plusieurs fois en France, en Angleterre et au Mali. Chose qui a mis en retard la sortie de son deuxième album enregistré depuis 2005 au studio Bogolan. Grâce au succès de son premier album, Idrissa fut le lauréat du Prix découvert RFI 2004. C’est seulement le mardi 14 juillet dernier au « studio Bogolan » qu’il a finalisé son deuxième album accompagné par un grand musicien Français M. François Breant. Ce nouvel album est composé de 12 titres et sera dans les bagues en fin d’année.
Cette sortie va sûrement couper le souffle aux fans d’Idrissa soumaoro, car il contient les dernières voix et guitare de Ali Farka Touré qui, malgré sa maladie, a voulu participer à cet album. La voix de Kandia Kouyaté y figure aussi.
En ce qui concerne les innovations apportées dans le nouvel album, selon son auteur, c’est que le premier était fait de rythmes variés entre la Rumba, le Blues, la musique populaire Malienne à travers la musique des chasseurs et du Diazz. A ces variétés s’ajoutent la pinta tonie de Wassoulou et la musique orientale.
Idrissa Soumaoro est issu d’une famille où la musique n’est pas un métier. Mais son destin a fait de lui un artiste hors paire. C’est pourquoi dès à bas âge, il commença sa carrière musicale étant élève. A cette époque déjà, Idrissa jouait des instruments de musique comme le Pupo qui est une sorte de flûte à six trous, le Kamélé N’goni et la guitare qui lui a été enseignée par son beau frère le regretté Idrissa Diakité qui fut enseignant et musicien. C’est après tant d’années d’apprentissage en la matière qu’Idrissa Soumaoro intègre l’orchestre « Djitoumou Diazz » où il fut l’animateur principal de par le son de sa guitare et la qualité de sa voix exaltante.
Après son admission au DEF en 1967, Idrissa Soumaoro a opté pour l’Institut National des Arts (INA) où il eut l’embarra de choix entre la musique et le dessin. Le paradoxe est qu’il était très doué en musique et en dessin mais finalement, il opta pour la musique qui, selon lui-même, est une passion. C’est pourquoi dira t-il : « la musique est une passion pour moi. C’est pourquoi d’ailleurs j’ai quitté ma famille pour aller vers ma grande sœur au profit de la musique et c’est son mari qui ma encadré en tant que musicien. C’est grâce au regretté Idrissa Diakité que je suis devenu ce que je suis aujourd’hui. Il fut un père spirituel pour moi que Dieu lui accorde le paradis ».
C’est après sa formation à l’INA que Idrissa Soumaoro s’envolera pour des études supérieures et pour faire sa spécialisation en musique Braille en Angleterre où il décrocha un diplôme de musicographie Braille.
L’auteur de « Ancien combattant » est un artiste compositeur qui sait aussi manier la guitare, la flûte, le piano et le Kamélé N’goni. Et c’est avec une bonne dose d’humeur et d’humour que le monstre sacré de la musique Malienne s’adresse à son auditoire depuis les années 1969 à travers ses premiers enregistrements au nombre de trois volumes à la RTM le nom d’antan de L’ORTM.
La musique de M. Soumaoro est du genre kôtè, le raccourci du kôtèba qui est une forme musicale mettant en scène les tares de chacun. Ainsi, tout le monde se reconnaît dans cette musique en bien ou en mal. Aux dires de M. Soumaoro, au sein sa famille, il n’y a pas de mystère autour de la chanson, c’est pourquoi, il s’en sort partout en matière de la musique et cette qualité qui a fait de lui virtuose de la musique du Mali.
De 1973 à 1978, le musicien hors paire a travaillé pendant un bon bout de temps avec des artistes et groupes comme les Ambassadeurs avec Salif Kéita, Koly et les Acolytes à l’Hôtel de l’Amitié qui ont fait le beau temps de la musique Malienne.
De l’avis de Idrissa, le travail d’un artiste ou d’un griot consiste à faire référence aux aînés, contribuer consolidation de la paix pour le bien-être des familles et du pays, aider toute la nation à changer de comportement face aux maux qui rongent la société.
Si le deuxième album d’Idrissa Soumaoro est composé de 12 titres, le premier était de 14 titres dont 8 anciens figurant dans les enregistrements des 1969 à la RTM et 6 nouveaux. Parmi les chansons concoctées par Idrissa Soumaoro dans son 1er album, c’est le titre « ancien combattant » y figure qui est une histoire réelle que l’artiste nous a révélée au cours notre entretien.
A ses dires, l’histoire s’est passée dans son village chez un ami à Ouélessebougou à quelques kilomètres de Bamako. Les faits : Un jour lorsque Idrissa prenait du thé avec son ami dont le père fut un ancien combattant, un jeune homme du village poursuivait sa sœur. Et cette dernière est venue se réfugier chez le vieux. Malgré tout, le jeune homme a corrigé sa sœur.
Pour le Vieil ancien combattant, selon les coutumes, quand un enfant se confie à quelqu’un, on le laisse. Etant fâché, le vieux proférait des injures contre le jeune homme.Souvent l’ami de M. Soumaoro se moquait de lui et lui aussi n’a eu comme solution que de profiter de la scène jouée par son père. Et c’est ainsi qu’il improvisa ce que disait le vieux et c’est petit à petit que Idrissa à améliorer cette œuvre pour en faire une chanson.
Marié à une battante, le virtuose de la musique malienne s’est marié très tôt d’ailleurs, à la l’âge de 24 ans. Chose qui a fait de lui un homme comblé aujourd’hui. Puisqu’il ne parait pas à son âge, il parait plus jeune. Son fils Sidi Soumaoro alias Ramsès, le pivot du groupe « Tata pound » qui est déjà devenu le fils de son père grâce à son talent en matière de la musique Rap. Une affaire qui marche très bien pour lui ainsi que les membres du groupe que sont Dixon et Djodama.
Depuis 2004, Idrissa a cessé de jouer de la musique de variété dans les grands hôtels et espaces culturelles de Bamako. Il se consacre maintenant à sa fonction d’Inspecteur général de musique, ainsi que les tournées et concerts à l’intérieur et à l’extérieure du Mali.
Les vrais problèmes d’un artiste au Mali
Selon l’explication de l’artiste hors paire, les artistes Maliens sont confrontés à de nombreux problèmes dont le manque de formation ainsi que le fléau de la piraterie. « C’est dommage que les artistes qui sont les ayant droits ne jouissent pas du fruit de leur métier. Pour résoudre le problème de la piraterie au Mali, il faut l’implication des artistes d’abord et l’Etat pour que les artistes puissent rentrer dans leur droit ».
Comme conseil, suggérera Idrissa Soumaoro, le travail bien fait, l’écoute des personnes âgées pour apprendre, la patience. Il a, par ailleurs, souligné que l’évolution de la musique Malienne est assez satisfaisante, c’est pourquoi elle a fait de nombreuses percées de l’Afrique aux Etat unis en passant par l’Europe ces derniers temps.
« Il faut que le gouvernement s’implique dans la lutte contre la piraterie et ce serait un plus pour le bonheur des artistes » conclura t-il.
Mariétou Konaté