Les femmes, dans un document de plaidoyer, recommandent d’encourager la production nationale et la consommation locale.
A l’instar de la communauté africaine, le Mali a célébré hier la Journée panafricaine de la femme. La cérémonie officielle de commémoration a eu lieu au Centre international de conférences. Elle était présidée par l’épouse du chef de l’État, Mme Touré Lobbo Traoré, et s’est déroulée en présence de membres du gouvernement, de nombreuses personnalités et femmes mobilisées pour la circonstance.
Le programme comportait essentiellement trois discours, un document de plaidoyer des femmes du Mali sur la cherté de la vie adressé au Premier ministre, des remises de diplômes de reconnaissance et de prix, un défilé de mode des communautés africaines du Mali.
La secrétaire exécutive de l’Organisation panafricaine pour l’Afrique de l’ouest, Mme Alwata Ichata Sahi a remercié le chef de l’État, Amadou Toumani Touré, son épouse, le gouvernement, les associations de femmes, ainsi que tous les partenaires pour leur accompagnement constant des femmes. Après avoir rappelé que l’Organisation panafricaine des femmes a été créée voilà 46 ans en Tanzanie, elle a demandé une minute de silence à la mémoire de feue Mme Attaher Jeannette Haïdara, membre fondatrice de l’organisation, décédée en mai dernier (lire l’Essor d’hier).
La décision de commémorer le 31 juillet a été prise à Dakar en 1974. La Journée offre un cadre privilégié d’échange et de dialogue entre les femmes et leurs gouvernements sur les grands problèmes qui minent le développement durable de l’Afrique, a indiqué Mme Alwata Ichata Sahi. La Panafricaine est, par conséquent, placée chaque année, sous un thème. Celui de cette année -« Mondialisation : défis et responsabilités des femmes du Mali face à la cherté de la vie »- s’inscrit parfaitement dans cette logique.
FEMINISATION DE LA PAUVRETE. Évoquant l’impact négatif de la mondialisation qui pèse particulièrement sur les femmes, Mme Alwata Ichata Sahi a souligné qu’au Mali, ces dernières jouent un rôle essentiel dans la vie de la société et subissent de plein fouet les conséquences de la globalisation. Toutes les organisations internationales s’accordent à reconnaître la féminisation de la pauvreté, a t-elle relevé. Aussi, les femmes constituent 70% des pauvres de la planète. Le rapport des Nations Unies sur la situation de la pauvreté dans le monde en 2005 établit que les inégalités vont de pair avec la mondialisation. Ainsi, 5% de la population mondiale possèdent plus des 3/4 des richesses de l’humanité et 2 pour mille contrôlent la moitié de la capitalisation boursière.
Aujourd’hui, même les pays les mieux gouvernés n’ont pas réussi à faire suffisamment de progrès pour réduire la pauvreté, a constaté la secrétaire exécutive de l’OPF en soulignant la hausse, sur le marché international en 2005 et 2006, des prix des produits alimentaires et de l’énergie, créant des déséquilibres dans tous les pays du monde. Au plan régional, elle a indiqué qu’en dépit d’un taux élevé de croissance de la population (2,3%) par an, le nombre de personnes extrêmement pauvres s’est stabilisé.
Mme Alwata Ichata Sahi a salué les efforts du gouvernement en vue de corriger les effets négatifs de la vie chère et souligné la responsabilité et le rôle fondamental de chacun des acteurs du développement dans la mise en pratique de l’axiome : « consommons ce que nous produisons et produisons ce que nous consommons ».
Le ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, commentant le thème de cette année, a relevé combien la mondialisation fragilisait nos économies, contribuant à la cherté de la vie par la hausse des prix des hydrocarbures et des produits de première nécessité. Les femmes sont particulièrement touchées en tant que gestionnaires des foyers, soulignera Mme Maïga Sina Damba en rappelant que la situation aurait pu être dramatique si le gouvernement n’avait fait preuve d’anticipation en adoptant des mesures propres à aider la grande majorité de la population composée de pauvres.
Les femmes étant les premières victimes de la vie chère, elles doivent être les premières actrices de la lutte contre ce phénomène, une lutte qui ne saurait se limiter aux seuls efforts de l’État, a jugé Mme Maïga Sina Damba.
Déjà, les femmes rurales s’engagent afin de réussir l’Initiative riz et ont été encouragées sur cette voie, s’est félicitée le ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille. Mme Maïga Sina Damba a remercié les hautes autorités du pays et tous les partenaires pour leur accompagnement constant et leur engagement auprès des populations féminines.
AU COEUR DU CHANGEMENT. Hommage doit être rendu à la femme, a jugé la Première dame en considération de son rôle de gardienne du pouvoir d’achat et de l’obligation qui lui incombe de trouver la solution à des problèmes souvent très durs. Mme Touré Lobbo Traoré a, elle aussi, salué les initiatives de l’État et de ses partenaires nationaux et internationaux visant à atténuer les effets de la crise sur les ménages. Un élan qui, de son point de vue, doit être maintenu et renforcé.
Mme Touré Lobbo Traoré a souligné la possibilité d’enrayer la spirale inflationniste en produisant plus et surtout en consommant ce que nous produisons. Les femmes, dira-t-elle, doivent être au coeur de ce changement indispensable dans les habitudes de consommation. Elle leur a, par conséquent, demandé de mettre à profit la journée pour engager une étude approfondie sur l’ensemble de ces questions qui interpellent l’État, les opérateurs économiques, les ménages et le citoyen.
Les femmes, par l’entremise de la présidente de la Cafo, Mme Oumou Touré, ont adressé au Premier ministre un document de plaidoyer sur la cherté de la vie. Le document préconise plusieurs mesures au premier rang desquelles l’encouragement de la production nationale, l’émergence d’un large marché interne pour écouler nos produits, la promotion de la création d’emplois productifs et générateurs de revenus notamment dans le domaine agricole.
Les femmes recommandent le renforcement des capacités des structures chargées de veiller à l’application correcte des prix, le recours à l’expertise des femmes dans la gestion de la crise, la production et la transformation des produits locaux, les incitations à la consommation locale et la diminution des dépenses liées aux cérémonies sociales.
Sept diplômes de reconnaissance pour des initiatives privées en matière de lutte contre la pauvreté ont été décernés respectivement à Mme Maïga Yorobo Diarra, présidente de l’association des femmes de Moribabougou, la fédération des communautés africaines du Mali, Mme Sira Diop, l’Ascoma, le Commissariat à la sécurité alimentaire, l’Unité de transformation Yaye Kébé Diakité, Mme Mariko Fadima Siby, promotrice de Ucodem. Trois prix ont été ensuite attribués aux lauréats d’un concours culinaire.
Le groupe Nyogolon a présenté un sketch sur l’implication de la femme dans la prise de décision dans la société.
F. MAÏGA