Expérience unique sur le continent et initiée par le chef de l’Etat, l’institution tire sa force de son indépendance
Moins d’une semaine après avoir reçu le rapport 2007 du Bureau du vérificateur général (voir l’Essor du 1er août), le président de la République, Amadou Toumani
Touré était hier dans les locaux de cette institution. Cette visite inédite a été particulièrement bien appréciée par le Vérificateur général, Sidi Sosso Diarra et ses collaborateurs.
C’est aux environs de 10 h 55 mn que le véhicule transportant le chef de l’État s’est immobilisé devant les locaux du Bureau du vérificateur général installés à l’ACI 2000. Cette visite tombe fort à propos. Elle survient en effet au moment où les rapports de vérification de l’institution sont diversement interprétés tant par les structures contrôlées, que par les citoyens ordinaires. En outre, ces derniers se montrent de plus en plus sceptiques quant au traitement réservé aux rapports.
Après l’accueil par le Vérificateur, ses collaborateurs et des responsables du district de Bamako, Amadou Toumani Touré a eu un entretien en tête-à-tête avec le Végal. Rien n’a filtré de cette rencontre mais l’on peut aisément deviner que le chef de l’État a réaffirmé son soutien au BVG, une institution dont il est l’initiateur. Cet entretien sera suivi d’une visite des bureaux de l’institution. Il convient de souligner que le Bureau constitue une expérience inédite en Afrique. Si ailleurs sur le continent, des volontés politiques se sont exprimées en faveur de la lutte contre la corruption et la délinquance financière, au Mali les autorités ont été nettement plus audacieuses. « C’est à l’expression d’une volonté et d’un courage politique forts que souscrit un pays en acceptant de se remettre en cause, de se contrôler et de s’évaluer non seulement pour connaître ses insuffisances et ses difficultés, mais aussi pour corriger ses erreurs et aller de l’avant. », a indiqué le président de la République, avant de faire un bref rappel historique des initiatives prises par les gouvernements successifs de notre pays en matière de lutte contre la corruption et la délinquance financière.
Ainsi sous la Ière République, pour protéger l’important parc de sociétés et entreprises d’État le gouvernement avait engagé une lutte résolue contre la corruption et la délinquance financière. Au temps du Comité militaire de libération nationale (CMLN), l’acuité du problème avait amené les autorités à mettre en place un dispositif de veille pour circonscrire le phénomène. C’est ainsi que la Cour spéciale de sûreté de l’État a été installée. Plus tard, sera adoptée la loi anti-corruption. Avec la IIème République, le gouvernement décida d’aller plus loin en créant une Commission nationale de lutte contre l’enrichissement illicite. Des dispositions ont été prises également sous la IIIè République pour lutter contre le phénomène.
LE GENRE ET LA DIASPORA : Revenant sur l’historique de la création du Bureau du vérificateur général, le chef de l’Etat a rappelé que l’idée lui était venue lors d’un séjour au Canada après qu’il ait conduit à son terme la Transition. Lors d’une visite chez le vérificateur canadien, il avait été séduit par l’originalité de l’institution et décida d’en créer une similaire dans notre pays après son retour aux affaires en 2002. C’est dire que le BVG qui vient renforcer les structures de contrôle existantes constitue donc une initiative personnelle du président Touré qui en a une nouvelle fois revendiqué la paternité. La force de l’institution réside dans son indépendance par rapport aux institutions de la République. Cela à la différence des autres structures de contrôle qui relèvent soit de la présidence de la République, soit de la Primature.
Dans une intervention faite au cours du cocktail qui a mis fin à la visite, Sidi Sosso Diarra a remercié Amadou Toumani Touré pour sa venue. Celle-ci honore l’institution et témoigne de tout l’intérêt du chef de l’État pour le BVG. « Vous le disiez vous-même, jeudi dernier lors de la remise du rapport 2007 : vous considérez ce Bureau comme une partie de vous-même. C’est également notre conviction, car connaissant votre implication personnelle pour que le Bureau du vérificateur voit le jour », a rappelé Sidi Sosso Diarra.
Le BVG créé il y a quatre ans dispose d’un effectif dépassant la centaine d’agents, dont une soixantaine de vérificateurs et assistants vérificateurs. Le parc automobile compte 15 véhicules, celui de l’informatique 43 ordinateurs portables, 30 ordinateurs de bureau et 6 serveurs. Le bureau est doté d’un budget de fonctionnement d’environ 3 milliards de F CFA, a révélé son patron. L’équité genre et la promotion des cadres issus de la diaspora constituent une préoccupation au BVG, conformément à la volonté du président de la République. Ainsi, 27 % du personnel sont des femmes et le processus de recrutement n’a pas négligé le vivier riche et diversifié que représentent les Maliens de l’extérieur.
S’agissant du bilan, Sidi Sosso Diarra a rappelé que de sa création en 2004 à ce jour le Bureau a effectué 75 missions de contrôle et a déposé 3 rapports annuels, conformément à la loi. Ces résultats ont été obtenus dans des conditions parfois difficiles.
Le BVG est logé dans un bâtiment exigu et Sidi Sosso Diarra a saisi l’occasion pour solliciter de nouveaux locaux qu’il espère inaugurer au côté du président de la République, avant la fin de son mandat. Le plaidoyer pro domo a été bien reçu par le chef de l’État qui a promis de reloger très rapidement le Bureau dans un immeuble flambant neuf, qui offrira les commodités et le confort nécessaire à un bon travail. Amadou Toumani Touré a assuré de nouveau l’institution de son soutien et de son accompagnement.
A. O. Diallo