Que ce soit Ibrahim Ag Bahanga ou que ce soit ses plumitifs de sbires, c’est du pareil au même : l’Ogre de l’Adrar dément très sérieusement toute idée de « retraite » consécutive à sa décision de prendre ses quartiers en Libye en compagnie de sa famille et de certains de ses proches. Dans une confusion de genres, à la quelle n’est étranger aucun observateur, Bahanga, pour toute défense, réclame la relance du dialogue et lance une menace à peine voilée de reprise des hostilités tout en réglant au passage son compte au député Ag Bibi auquel il dénie toute qualité de porte-parole. Il n’apporte pour autant guère davantage d’éclairage sur les mobiles de son exil libyen. D’où un sévère délire…
A peine rentré dans les bois que le loup Ibrahim Ag Bahanga en ressort. La raison c’est qu’après sa décision de s’offrir un repos du guerrier, en Libye, en compagnie de sa famille et de certains de ses proches, il a aussitôt déclenché une nouvelle polémique à son sujet ; de nombreux observateurs estimant que ce qui est en réalité un renie de la « cause » touareg, si elle a une seule fois existé pour lui, s’apparente à plus d’un égard à une « retraite ». Il n’en fallait pas plus pour piquer au vif et le faire sortir de ses gongs le chef des adultes égarés de la république, Ibrahim Ag Bahanga, pour se fendre en déclaration de dénégation, au nom de l’Alliance touareg Nord Mali pour le changement (ATNMC) et sous sa signature en qualité de président de cette alliance.
Confusion de genres
Pour Bahanga, son séjour en Libye n’est pas une « retraite ». Et pour lui il faut très mal connaître le dossier du Nord Mali pour penser à une telle éventualité. Ainsi l’Ogre de l’Adrar ne dit pas à quoi rime alors son refuge en Libye et qui à première vue pourtant n’est rien d’autre qu’un dénie de la « cause » qu’il était censée incarner et défendre, même au prix d’une violence aveugle et sauvage qui a laissé des plaies encore béantes avec de nombreuses victimes directes et collatérales.
Toutefois, tout en faisant l’impasse sur les motivations réelles de sa présence en Libye, Bahanga donne tout de même une clé de lecture et de compréhension de sa démarche : « Ma présence en Libye signifie retraite…pour ceux qui connaissent très mal le dossier Nord Mali ». A l’évidence, la retraite liée à sa démarche est restée en travers de la gorge de Bahanga et ces propos sont des plus symptomatiques des nombreux pièges classiques qui grouillent sous le dossier du Nord Mali. Mais là également, Bahanga n’est guère davantage plus explicite quant à ses intentions présentes et futures. Même si cela est de bonne guerre, il pourrait s’agir néanmoins de l’exutoire d’un homme qui a épuisé ses cartouches de la surenchère et de la supercherie dans l’attente d’une nouvelle potion enivrante.
A l’évidence, Bahanga, surpris en flagrant délit de trahison de la « cause », s’en mêle les pinceaux et les pédales au point de verser dans une confusion de genres à laquelle aucun observateur ne saurait être véritablement étranger, depuis l’éclatement de cette crise un certain 23 Mai 2006 avec l’attaque des casernes de Ménaka et de Kidal. D’ailleurs, difficile de convaincre, autant les siens que les autres partenaires, en se mettant volontairement à la touche avec sa famille et des proches, sans raison objective, d’un quelconque attachement à l’idéal de départ. Aucune menace n’ayant jamais été proférée contre les familles des leaders touaregs qui ont pris sur eux de s’engager dans le maquis. Bien au contraire, ces familles ont toujours bénéficié de l’aide et de la protection des pouvoirs publics qui ne leur imputent aucune responsabilité dans ce qui arrive. Ces faits sont vérifiables.
Délire et tourment
Ainsi réduit à l’attitude d’un enfant surpris en faute, Bahanga n’avait d’autre alternative que de verser dans un délire puérile d’attaque ciblée en règle et stérile contre l’honorable Amada Ag BIBI auquel il dénie désormais toute qualité de porte-parole de l’Alliance. Pourtant, n’eut été son écharpe et son macaron qui ne font pas bon ménage avec les kalachs des rebelles, Ag BIBI a plus qualité que lui qui se prélassait en Libye pendant que les membres de l’ADC discutaient d’une solution de sortie du crise au Nord, le week-end dernier. Quel est du reste le rapport entre la qualité de porte-parole de Amada et le refuge en Libye de Bahanga ? Manifestement aucun.
Décidément, pris dans son délire et tourmenté par sa conscience, Bahanga ne trouve pas mieux que d’affubler l’Etat malien de la seule tare qu’il n’a jamais portée : le refus du dialogue. Jusqu’à preuve du contraire, les autorités maliennes n’ont en effet prôné que le dialogue et y ont toujours répondu présent, même si le suivi et l’application des recommandations sont une autre paire de manche. Aussi, en menaçant : « si dans les jours qui viennent les autorités maliennes ne répondent pas à notre invitation de dialogue, elles assumeront ce rejet de dialogue qui pourrait avoir des répercussions graves dans les jours qui viennent sur le terrain, car notre mouvement est très présent sur l’ensemble des régions Nord », Bahanga ne fait ni plus, ni moins que se livrer à un mensonge grossier et grotesque visant à mettre en cause un Etat qui a d’ailleurs toujours été accusé de trop dialoguer et de ne pas prendre ses responsabilités quand il le faut.
Empêtré désormais dans une situation passablement inextricable et rattrapé par ce qui a fait l’objet de son combat, ou supposé tel, Bahanga ne semble trouver son salut que dans des menaces à peine voilées de reprise des hostilités sur le terrain. Là également, la réplique est mal appropriée d’autant que les mobiles pour une telle option, en l’état actuel des choses au Nord, sont inexistants. Parce que le dialogue se poursuit et il n’est juste plus question que de « régler certains détails », importants certes, mais non insurmontables. Autant dire que la menace de reprise des hostilités n’est autre qu’une lamentable tentative de Bahanga de se donner bonne conscience aux yeux des siens en faisant croire sa présence et son opérationnalité alors qu’il se trouve lui-même à mille lieues avec ceux qui lui sont chers.
Par Bertin DAKOUO