Une vaste étendue désertique à perte de vue infestée de djihadistes suréquipés avec téléphone satellitaire et arsenal de guerre impressionnant qui pullulent et des narcotrafiquants en quête de planques ou de zones de transit, face à une présence militaire des plus sommaires : insécurité chronique, trafic et contrebande en tous genres, prise d’otages…. Voilà le décor et l’équation du Nord-Mali.
5 novembre, un avion de type Boeing bourré de cocaïne atterrit en toute impunité à Tarkint (région de Gao). Après avoir débarqué en toute tranquillité sa cargaison, il ne parvient pas à décoller. L’équipage, avec des complicités au sol (sûrement), met le feu à l’avion et disparaît dans la nature, ni vu ni connu. Jusqu’ici, aucune nouvelle de l’équipage et de la cargaison… L’indignation et la pression internationale se font pesantes : on attrape deux pauvres ferrailleurs venus (dit-on, effacer les preuves) s’approvisionner dans la carasse abandonnée.
C’est dans cette tourmente sécuritaire où notre pays cherche les comment et les pourquoi, à élucider avec l’aide internationale les mystères de « Air-cocaïne », que Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) décide de frapper sur notre territoire, à Ménaka : en prenant en otage un Français. Selon l’association qu’il préside dans les Vosges (Est de la France), Pierre Camatte, 61 ans, est un bénévole français fréquent dans notre pays où il s’implique dans la culture d’une plante thérapeutique contre le paludisme.
Très alerte quant à la sécurité des Français à l’extérieur, le Quai d’Orsay décrète le Nord-Mali « zone dangereuse » et le déconseille à ses ressortissants «en raison d’une nouvelle aggravation de la menace terroriste dans la région».
De cette mauvaise publicité, notre pays voudrait bien se passer, si la nature ne l’avait pas confiné dans l’étroitesse des moyens et par conséquent obligé, bon gré, malgré gré, à accepter l’aide de plus outillés que lui et qui sont engagés dans la lutte planétaire contre les réseaux terroristes. Mauvaise option ou mauvaise posture ?
Si l’on peut reprocher au régime du Président ATT sa tergiversation et son laxisme dans la traque des bandits armés, peut-on le tancer d’avoir pris le parti de s’allier avec les Américains dans la guerre contre le terrorisme ? Le Mali a-t-il d’autres choix que celui de s’engager aux côtés du « Grand Satan » ou de subir la loi des « fanatiques » et « terroristes islamistes » ?
Une Position peu enviable pour un pays qui manque presque de tout et dont la relative stabilité dépend beaucoup plus de l’obole de la Communauté internationale que des ressources nationales (coton dont les cours ne sont plus au zénith et l’or qui n’a jamais brillé pour les Maliens). En investissant donc le Nord-Mali, Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) sait qu’il a à faire face à un pays dont la capacité opérationnelle en terme riposte, au regard de la faiblesse de ses moyens, est quasi nulle ou en tout cas bien limitée. Aussi, est-elle très mal prise par les terroristes la collaboration de leur « hôte » avec les Occidentaux, notamment l’armée américaine qui vient de doter l’armée malienne de logistiques et de matériels sophistiqués pour optimiser justement la capacité opérationnelle du Mali dans la lutte contre le terrorisme et le banditisme armé. Toute chose qui mettrait nos hommes de la défensive à une position offensive contre les barbus.
L’étau se resserrant sur les terroristes, et face à ce péril de plus en plus imminent dans le désert malien, la meilleure défense étant par ailleurs l’attaque, Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) choisit d’éprouver sa vieille tactique : la prise d’otage.
Sauf que cette fois-ci, c’est moins dans une optique de marchandage financier que dans une stratégie purement militaire : le Français et les trois Espagnoles pouvant bien lui servir de boucliers humains en cas d’offensive de l’armée malienne outillée par l’US Army. Or, ça, ça complique énormément les données et surtout quand on sait l’hostilité du Commandant en Chef de l’armée malienne aux « guerres inutiles » et l’approche occidentale quant à l’utilisation de la force pour libérer les otages, on peut mesurer la mauvaise posture de notre pays et la singulière rançon qu’il paye suite à son rapprochement avec les Occidentaux dans cette lutte contre le terrorisme. En effet, en décrétant le Nord-Mali « zone dangereuse » et le Mali « pays à risque », ce sont les mêmes qui disent nous aider mais qui nous mettent en quarantaine, privant les trois zones régions du Mali de substantielles revenues issues du tourisme. Or, pour qui connaît le Nord-Mali, que serrait-il sans le tourisme ?
S’il est vrai que la stabilité de notre pays par un Nord-Mali débarrassé des terroristes et des bandits armés, qu’est-ce que le Mali gagnerait à être estampillé « pays à risque » ?
Par Sambi TOURE
Rectificatif
Dans notre édition du jeudi dernier, dans notre article intitulé « Air cocaïne : une affaire d’Etat », une erreur nous a fait prendre « origine sud-américaine » pour « origine sud-africaine » et fait publier la photo du Président Jacob ZUMMA en UNE pour illustrer le titre ; alors que l’Afrique du Sud n’est nullement concernée par cette affaire.
Nous présentons nos humbles excuses à nos fidèles lecteurs et à l’Ambassade sud-africaine qui a eu l’aimable attention d’attirer notre attention sur la grossière erreur.