Salif Keita est probablement le Malien le plus connu du moment. Avant le président, les anciens présidents, les marabouts, les prêtres. De Kolondieba à Aguel Hoc et de Kamandapé à Labezanga, on fredonne ses chansons. Ses CD se vendent tant sur les îles Fiji qu’en Patagonie. Son timbre est unique et son parler hautement poétique.
L’enfant de Djoliba est un monument de ses débuts avec le Rail Band à maintenant, en passant par les Ambassadeurs du Motel et le contrat avec Mango. Et puis, ce qui n’a pas de prix, il est le plus grand avocat de la planète pour la cause des Albinos. Et pour cause, il en est un lui-même. C’est connu, il dit partout qu’il a souffert de ce statut et il reproche à la société malienne d’ostraciser les albinos. Pourtant, tous les chercheurs en sciences sociales considèrent que nos sociétés sont très inclusives, donc qu’elles n’écartent à priori personne. Bon, c’est vrai que le chanteur a été mal orienté après le Def et que le métier d’enseignant n’était pas pour lui. Mais moi aussi à cause de mon prénom dit féminin, j’avais été mal orienté, puisqu’on m’avait mis au Lycée Notre Dame dont je ne suis parti qu’après une violente protestation des filles! Pour ce que Salif qualifie de discrimination, n’est-ce pas que toutes les minorités les connaissent un peu chez nous, mais que ce n’est vraiment pas méchant ? Ecoutez, au lycée, moi je voulais me spécialiser dans la discipline des 1000 mètres mais l’administration scolaire, malgré mes protestations, m’en déclara inapte pour le ‘handicap prononcé sur la jambe droite’. Ce que, personnellement, je n’avais pas remarqué et continue d’ailleurs de nier. Reste l’amour qu’ont les pouvoirs pour les albinos. Il paraît que les princes sacrifient ces hommes rouges pour pouvoir régner longtemps. ça ce n’est pas bien. A mon avis, notre constitution règle ce problème avec l’article 35. Mais si ça ne suffit pas, sans me mêler de ce qui ne me regarde pas, mettons le siège de la Fondation des Albinos sous protection internationale avant la présidentielle de 2012 et barrons la route pour s’y rendre aux candidats déclarés et potentiels. Entre temps, Salif, si on t’appelle à Koulouba pour une distinction nationale, informe Le Républicain avant de monter. On n’est jamais trop prudent.
Adam Thiam