Le moins que l’on puisse dire, c’est que le sort réservé aux constructions édifiées sur le titre foncier 1621, sis à Niamakoro, ressemble étrangement à celui des condamnés à mort par la justice américaine.
En effet, tout comme ces prisonniers séjournent dans les couloirs de la mort, à Guatanamo,dans l’attente de la date de leur exécution, à Bamako, en Commune VI, des habitations et autres édifices attendent, inexorablement, le jour de leur casse. En tout cas, après avoir déjà démoli certaines concessions, Lahaou Fofana, fort de ses décisions de justice, se prépare à s’attaquer à des milliers d’édifices, dont plus de sept cent, dans l’immédiat.
Ainsi, se retrouvent dans le couloir de cette démolition entamée, des établissements scolaires, la mosquée du vendredi en chantier, des églises… Va-t-on alors revivre, à Niamakoro, un autre scandale foncier impliquant le monde chrétien, après l’affaire de Samaya?
Pourquoi cette affaire?
Pour comprendre cette affaire, il faut remonter au 25 Août 1975, date à laquelle le Tribunal de Première Instance de Bamako a rendu une décision déterminant les héritiers de feu Lahaou Touré. Parmi ces héritiers, figurent Mariam Touré et Cheickna Touré dit Hamala, respectivement mère et oncle de Lahaou Fofana.
Suite au partage partiel de la succession de feu Lahaou Touré, Cheickna Touré a bénéficié d’un certain nombre de parcelles du lot 71 du titre foncier 1621 sis à Niamakoro, en Commune VI du District de Bamako.
De son vivant, Hamala avait donné mandat à Lahaou Fofana pour gérer ses parcelles. Au décès de Hamala, la justice a déclaré M Fofana parmi les héritiers du défunt. Ainsi, le juge a déclaré que Lahaou Fofana a le droit d’agir au nom des héritiers de feu Lahaou Touré, pour défendre les biens laissés par ce dernier au profit de feu Cheickna Touré. C’est le cas de l’ilot 71 du TF 1621. C’est ce qui avait été contesté, mais sans succès, devant le juge, par Mody Coulibaly, l’un des acheteurs des parcelles de cet ilot.
Pourtant, dans l’arrêt de la Cour d’Appel de Bamako en date du 28 Novembre 2001, il ressort que la parcelle a été vendue par Lahaou Touré-le fils d’un frère du vieux patriarche titulaire du TF 1621- à Mody Coulibaly, alors que celui-ci n’a aucun droit sur ladite parcelle. Car aucun héritier ne l’a autorisé à vendre cette parcelle. Comme pour expliquer que la vente de la chose d’autrui est nulle.
Habitations et lieux de culte menacés
Après avoir demandé et obtenu l’expulsion de Mody Coulibaly et la démolition des constructions édifiées par ce dernier sur ladite parcelle, Lahaou Fofana se prépare à démolir d’autres concessions sur le TF 1621.
En effet, il s’agira, pour lui, de s’attaquer aux 46 habitations de l’ilot 71 et aux 662 lots concernés par le repartage, suite à une décision du Tribunal de Première Instance de la Commune III du District de Bamako. Si rien n’est fait, ce sont des milliards de nos francs, en investissements, qui voleront en fumée. Car, de l’avis de certaines personnes dans le domaine immobilier, la valeur moyenne des habitations est de trente millions de FCA.
En plus des maisons à usage d’habitation, des hôtels et bars-dancings sont dans le collimateur de Lahaou Fofana. On peut citer l’espace culturel Flamboyant, le bar Mabasso, l’hôtel Le Raizin, le bar Football, le bar La Bouteille, le bar Mont Hombori, etc
Comme si cela ne suffisait pas, des installations d’intérêt public seront aussi démolies. Cela va concerner d’abord des lieux de culte et centres de formation réligieux, comme la grande mosquée de vendredi située près du marché de Niamakoro. Ce serait un coup dur pour le Président ATT, lui qui a personnellement contribué à la construction, à hauteur d’au moins huit millions de FCFA.
Par ailleurs, si les plus hautes autorités du pays se félicitent d’avoir trouvé une issue heureuse à l’affaire de Samaya, aujourd’hui, le pouvoir ATT risque de faire face à la colère du monde chrétien. En effet, sont concernés par la démolition entamée des constructions sur le TF 1621 sis à Niamakoro des églises dont la dernière-née est située non loin de SYATEL, le centre international de formation Campus pour Christ, entre autres. Après l’affaire de Samaya, assistera-t-on à l’affaire TF 1621 de Niamakoro?…
Ecoles, hôtels et lieux de loisir aussi
Pour défendre son seul intérêt, Lahaou Fofana obligera de nombreux parents à chercher d’autres établissements scolaires, pour permettre à leurs enfants de poursuivre leurs études. Parce que la plupart des établissements scolaires situés dans la zone seront démolis.
Ainsi, les écoles secondaires Zéïna, Pamoutié, EMITEC Annexe, IFDC, le lycée Seydou Koné, le Soudanais, seront cassées. Pour les écoles fondamentales et les établissements préscolaires, la menace plane sur le Groupe Scolaire II de Niamakoro, construit il y a à peine une année ; le groupe scolaire Saint Pierre et de nombreuses écoles maternelles et primaires. Sans oublier que les stations services COMAP OIL, Tourning Oil, seront dégagées.
Ce ne sont là que des cas dont la démolition est déjà ordonnée ou attendent de l’être par la justice malienne. Mais pourquoi Lahaou Fofana a-t-il attendu tout ce temps avant de saisir la justice, pour qu’elle l’autorise à démolir les constructions sur le TF 1621? Il faut rappeler que le TF 1621 s’étend sur 147 hectares. Et l’ilot 71 n’en est qu’une infime partie.
En attendant la reprise des démolitions, et sans remettre en cause les décisions de justice, les questions suivantes taraudent les esprits : Au moment où les autres héritiers vendaient les parcelles litigieuses, Lahaou Fofana n’avait-il pas encore obtenu son ticket pour être héritier ? Car Lahaou Fofana est le fils de feue Mariam Touré, elle-même fille de feu Lahaou Touré.
Pourquoi c’est l’enfant de feue Mariam Touré, Lahaou Fofana seul qui s’agite dans cette affaire, et non les autres qui ont légalement le même droit et les mêmes prérogatives que lui? Pourquoi ce silence de la famille Touré de Bagadadji, face à ses agissements? Les autorités ne doivent-elles pas trouver un terrain d’entente avec Lahaou Fofana qui est détenteur de beaucoup de décisions de justice attestant l’existence de son droit de propriété, afin d’éviter à la capitale un volcan foncier?
Oumar SIDIBE